Milo est un petit garçon qui dort très mal (il se réveille toutes les 15 min), il se met en danger tout le temps, demande le sein à sa maman en continu (et refuse de manger quoi que ce soit d’autre quand il est avec elle), et la tape beaucoup. Pourtant, à la crèche, tout se passe bien (il mange bien, dort bien, et joue tranquillement sans taper personne). Sa maman, qui est seule sans compagnon ni parents ni amis dans la région, me confie qu’elle se sent vraiment malheureuse et épuisée. D’ailleurs, elle fait une dépression et a du mal à se relever (malgré un suivi médical). Elle n’a aucun soutien du « géniteur » qui n’a jamais reconnu son enfant.
Je commence par accueillir avec beaucoup d’empathie les émotions de cette maman qui vit une situation très difficile et qui semble à bout.
Puis, je me retourne vers Milo, et nous lui donnons la parole.
Il nous fait part d’emblée d’une peur concernant le fait qu’il est un garçon. Il croit que les garçons font forcément du mal à maman, et qu’étant donné qu’il en est un, il est nocif pour elle. La maman me dit qu’effectivement, elle a vraiment vécu beaucoup de choses terribles avec les hommes, (agressions sexuelles, violences physiques et verbales, abandons…) et qu’au fond, elle a conscience qu’elle partage cette croyance, même si bien sûr, cela ne concerne pas son fils.
Milo ajoute qu’il a peur que sa maman finisse par s’enlever la vie, et il insiste sur le fait qu’il a peur qu’elle le fasse par sa faute à lui. Il nous dit que selon lui, c’est inéluctable, elle le fera. La maman, qui semble à court de larmes, me dit qu’effectivement, par le passé elle a souvent songé à s’ôter la vie et qu’elle comprend qu’il en ait peur. Mais elle le réconforte en lui disant que depuis son arrivée, elle n’a plus ces pensées noires et que c’est lui qui lui donne envie de continuer à vivre.
Elle me dit qu’une fois, elle n’en pouvait tellement plus qu’elle a senti une pulsion et qu’elle a failli secouer son bébé. Elle a alors eu le bon réflexe, l’a posé et est parti quelques minutes pour se ressaisir. De mon côté, j’essaie de faire le lien entre le comportement de Milo et ce que je viens de traduire.
Je lui pose la question et il me répond : « Je crois que je dois mourir pour que maman puisse vivre. » Je comprends alors qu’il pousse sa maman à bout dans l’espoir qu’elle finisse par lui enlever la vie, afin qu’elle ne s’enlève pas la sienne. J’accueille les émotions de ce petit bonhomme qui aime tellement sa maman qu’il est prêt à se sacrifier pour elle. Sa maman et moi lui expliquons que c’est tout l’inverse de ce qu’il croit. Elle lui assure qu’elle est incapable d’aller jusque là, et que si cela devait arriver, ce serait justement une raison qui ferait qu’elle se suiciderait. Je rajoute que oui, maman a rencontré des hommes nocifs pour elle, mais que cela ne signifie pas que tous les hommes le soient. « Tu peux décider d’être bon et de prendre soin de toi, c’est la meilleure manière de rendre maman heureuse et de faire en sorte qu’elle aime la vie ».